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Féminisme

Le fait d’avoir choisi comme héroïne une femme n’est pas le pur produit du hasard, bien au contraire. Je viens d’une famille où il y a essentiellement des filles, j’ai toujours été entourée de femmes, souvent des femmes de caractère. J’ai moi-même deux filles. Est-ce pour cela que je me suis intéressée à Hélène plutôt qu’à Ulysse ou Achille ? Sans doute. Il m’a semblé qu’on avait assez parlé de ces valeureux héros, mais pas suffisamment des femmes qui les entouraient.

Le mouvement #metoo a bien sûr dû jouer aussi. On sent depuis quelques années une vague se lever pour rendre aux femmes la place qu’elles méritent. J’ai voulu moi aussi donner à une femme mythique un peu plus de voix. Et j’ai choisi Hélène qui, comme par hasard, vient de Sparte, cité connue dans l’Histoire pour avoir permis aux filles de recevoir une éducation, même physique, très proche de celle des garçons, même si ce n’était pas pour des raisons d’équité.

Même si l’on essaie de les remettre à l’honneur progressivement, les femmes ont été assez invisibilisées dans l’Antiquité. Bien sûr, quelques hommes ont pensé à écrire sur les elles, comme Sophocle dans plusieurs de ses pièces. Concernant les femmes autour du mythe de Troie, il faut aller chercher chez Euripide avec sa pièce les Troyennes. Pour autant, il m’est apparu que dans cette tragédie, les femmes étaient très larmoyantes, toutes victimes des vilains méchants Grecs. Et ma pauvre Hélène était parée de tous les vices imaginables, une vraie peste. Mais avec notre vision plus moderne, on ne peut plus croire que les femmes sont vouées à toujours être victimes du destin, des dieux ou des hommes.

J’ai donc voulu donner la parole aux femmes et réfléchir sur leur condition. Je me suis appuyée sur mon héroïne mais aussi sur les femmes qui l’entourent dans mon roman. Il est frappant – et terrible ! – de constater que ce qu’elles ont enduré lors de cette guerre de fiction est très proche de ce qu’elle vivent dans la réalité aujourd’hui encore dans certains pays. C’est ce qui fait de ces personnages des figures intemporelles et universelles de la femme.

Cependant, je ne fais pas partie de celles qui, sous prétexte de féminisme, sombrent dans le manichéisme et considèrent tous les hommes comme des ennemis à abattre. Dans les Troyennes, les hommes n’ont vraiment pas le beau rôle, ils sont tous horribles. Dans la littérature contemporaine et notamment dans certaines réécritures, j’ai souvent trouvé que les autrices tombaient dans le même piège.

J’ai essayé de m’en garder, en ne peignant pas Hélène comme une héroïne parfaite ou incarnant au contraire la perfidie absolue, mais en créant, je l’espère, un personnage un peu plus complexe. De même, je n’ai pas souhaité opposer sans cesse les femmes aux homme qui auraient tous été d’affreux héros machistes. Ménélas par exemple, dans mon roman, n’est pas dépourvu de qualités, et la veulerie de Pâris n’est peut-être pas vraiment de la lâcheté. J’ai tenté d’en faire des être de papier plus vraisemblables et plus proches de ce que nous sommes toutes et tous : des être imparfaits.

J’ai trouvé difficile cet exercice d’équilibriste qui a consisté à jongler entre le mythe, qui raconte des histoires d’un autre millénaire où les choses étaient vues d’une manière qui nous semble aujourd’hui très archaïque et machiste, et ma réécriture plus moderne éclairée par notre mentalité du XXIe siècle, tout en essayant d’éviter un féminisme « anachronique ». Ainsi ai-je essayé d’aborder la condition des femmes et des hommes de l’Antiquité d’une manière un peu différente de ce que j’ai lu jusqu’à présent.

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